Pérou, activités de déminage

Activités de déminage en Équateur et au Pérou : 2003-2015

Dispositions du DIH

Règles fondamentales du droit international humanitaire (DIH) applicables dans cette situation :


Il est interdit d’employer des moyens ou des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus.

Lorsque des mines terrestres sont employées, des précautions particulières doivent être prises afin de réduire au minimum leurs effets indiscriminés.

Une partie au conflit qui emploie des mines terrestres doit, dans toute la mesure possible, enregistrer leur emplacement.

Après la cessation des hostilités actives, une partie au conflit qui a employé des mines terrestres doit les enlever ou les neutraliser d’une autre manière afin qu’elles ne puissent porter atteinte à des civils, ou faciliter leur enlèvement.

Résumé du cas d’étude

En 1995, un conflit armé entre l’Équateur et le Pérou a été déclenché suite à un différend frontalier. Une région reculée, le long de leur frontière commune, a été contaminée par les mines. Les parties ont signé un accord de paix en 1998.

Le Pérou a ratifié la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction (Convention d’Ottawa) en 1998 ; l’Équateur l’a ratifiée en 1999. Conformément à la convention et avec le soutien de la communauté internationale, en particulier l’Organisation des États américains (OEA), l’Équateur et le Pérou ont coopéré pour enlever les mines dans les zones contaminées.

Respect du DIH : les points à retenir

  1. Dans le cadre d’un projet de l’OEA visant à consolider la paix entre les parties au conflit, les forces armées de l’Équateur et du Pérou ont participé à des opérations conjointes pour déminer la zone frontalière située entre les deux pays. Avec le soutien de l’OEA, de l’Union européenne et d’autres acteurs, les parties ont :
    • progressé dans les activités de déminage des zones contaminées et dans la destruction des stocks, en échangeant des informations et en coopérant lorsque nécessaire
    • organisé une réunion régionale au Pérou (2003) et en Équateur (2004) afin d’améliorer l’action antimines dans la région, avec le soutien du Programme d’action intégrale contre les mines antipersonnel (AICMA) de l’OEA
    • mené des campagnes de sensibilisation sur les dangers que représentent les mines dans leurs pays respectifs.
  2. Entre 2011 et 2015, le Pérou a déminé près de 170 000 m2 de zones contaminées, détruisant 9 265 mines.

Ce cas pratique a été élaboré par Camila Dupret Torres, David Köller et Eva Vaz Nave, étudiants en droit (LL.M) à l’université de Leiden, sous la supervision de Robert Heinsch (professeur) et de Sofia Poulopoulou et Christine Tremblay (chercheuses doctorantes et assistantes de recherche) du Kalshoven-Gieskes Forum de l’université de Leiden.

 

A. PÉROU : CONTRÔLE DES MINES ANTIPERSONNEL ET DES ARMES À SOUS-MUNITIONS

[Source : International Campaign to Ban Landmines: Landmine and Cluster Munition Monitor, « Peru », 22 novembre 2016, [traduction CICR] disponible sur http://www.the-monitor.org/en-gb/reports/2016/peru/mine-action.aspx (les notes de bas de page ont été retirées)]

 

[…]

 

Contamination

Au Pérou, la contamination par les mines est le résultat d’un conflit frontalier avec l’Équateur en 1995. La zone frontalière contaminée par les mines se situait majoritairement dans la cordillère du Condor, qui était au centre du conflit.

 

[…]

 

Respect de l’article 5

Conformément à l’article 5 de la Convention sur l’interdiction des mines (et à la prolongation du délai de huit ans accordée par les États parties en 2008), le Pérou a l’obligation de détruire toutes les mines antipersonnel dans les zones minées sous sa juridiction ou son contrôle dès que possible et au plus tard le 1er mars 2017. Le Pérou ne pourra pas respecter le délai de 2017 et a donc demandé une deuxième prolongation, cette fois-ci d’une durée de sept ans et dix mois, soit jusqu’au 31 décembre 2024.

Ces cinq dernières années, le Pérou a déclaré avoir déminé seulement 170 000 m² de zones contaminées au total, avec la destruction de 9 265 mines (voir tableau ci-dessous).

 

 

Élimination des mines entre 2011 et 2015

Année 

Superficie déminée (m2)  

Nombre de mines détruites  

2015

76 335

897

2014

8 458

478

2013

25 715

2 374

2012

13 791

4 021

2011

46 572

1 495

Total

170 871

9 265

[…]
 

B. LA RÉUNION DES ÉTATS PARTIES À LA CONVENTION SUR L’INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL RECONNAIT LES PROGRES REALISÉS DANS LA DESTRUCTION DES STOCKS

[Source : Anti-personnel mine ban convention, ‘Landmine Treaty Meeting Concludes with Advances in Stockpile Destruction, 158 Countries no Longer Hold Anti-Personnel Stockpiles, 5 décembre 2016, [traduction CICR] disponible sur https://m.reliefweb.int/report/1808259?lang=fr]

 

 

Santiago, Chili – À l’issue d’une semaine de travail à Santiago, au Chili, la quinzième réunion des États parties à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel (15MSP) a reconnu les progrès réalisés dans la destruction des stocks de mines […].

 

Trente-deux (32) États parties, dont cinq en Amérique latine (l’Argentine, le Chili, la Colombie, l’Équateur et le Pérou), sont toujours engagés dans un processus de déminage des zones polluées.

 

 

[…]

 

Le Pérou, qui doit s’acquitter de ses obligations avant le 1er mars 2017, mène des opérations conjointes avec l’Équateur pour déminer leur frontière commune. Le Pérou a reçu de nouvelles informations de l’Équateur concernant l’existence de 138 zones contaminées dans la cordillère du Condor. En raison de cette contamination dont il n’avait pas connaissance jusque-là, le Pérou a fait savoir qu’il ne lui sera pas possible de respecter la date butoir qui lui était imposée. Le Pérou a obtenu un report du délai au 31 décembre 2024 et devra soumettre un plan d’action actualisé le 30 avril 2018 au plus tard.

 

[…]

 

C. PROGRAMMES D’ACTION CONTRE LES MINES EN AMÉRIQUE LATINE

[Source : CIDHG, « Evaluation of EC-Funded Mine Action Programmes in Latin America », Genève, juillet 2008, [traduction CICR] lien non disponible]

 

[…]

 

2. BILAN DE LA MISSION AU PÉROU

 

[…]

 

L’une des difficultés posées par les mines est la contamination de la frontière entre le Pérou et l’Équateur, à la suite d’un conflit frontalier qui fut bref mais violent et qui a éclaté en 1995. La région est montagneuse et reculée, difficile d’accès, avec de larges zones non habitées. Le travail d’élimination est entrepris par les forces militaires des deux pays dans le cadre d’un projet commun mis en œuvre par l’intermédiaire de l’Organisation des États américains (OEA). L’objectif stratégique générale du projet est de renforcer le processus de paix entre les deux pays.

 

[…]

 

D. APPUI À L’ACTION CONTRE LES MINES ANTIPERSONNEL EN ÉQUATEUR ET AU PÉROU

[Source : Organisations des États américains, Appui à l’action contre les mines antipersonnel en Équateur et au Pérou, 6 juin 2006, AG/RES.2181 (XXXVI-O/06), lien non disponible]

 

[…]

 

RECONNAISSANT les importantes avancées réalisées par l’Équateur et le Pérou en matière de déminage, de destruction de stocks […] ainsi que la haute importance que revêt l’action humanitaire contre les mines lorsqu’elle est réalisée conjointement et en coordination, comme en témoigne la tâche qu’accomplissent les Gouvernements de l’Équateur et du Pérou sur leur frontière commune, et qui a donné lieu à un échange d’informations et des niveaux de coopération constituant une mesure concrète d’encouragement de la confiance mutuelle […] ;

 

[…]

 

PRENANT NOTE des travaux de déminage humanitaire correspondants ainsi que des campagnes de sensibilisation et d’assistance aux victimes dans les deux pays ;

 

[…]

 

RECONNAISSANT :

 

[…]

 

La précieuse collaboration apportée par les États membres et par les Observateurs permanents près l’OEA ainsi que d’autres pays aux efforts nationaux déployés en Équateur et au Pérou en vue d’avancer leurs programmes de déminage ;

 

La coopération financière de l’Union européenne dans le cadre du “Projet relatif aux mines antipersonnel dans la Cordillère du Condor, Pérou-Équateur”, qui permettra aux deux pays de poursuivre leur action concertée contre les mines antipersonnel dans une région revêtant une importance sociale et écologique particulière ;

 

L’établissement […], au Pérou, du Bureau régional de déminage à Bagua, Département d’Amazonas ;

 

Les importants efforts de coordination, de promotion et de levée de fonds accomplis par le Secrétariat général, par l’intermédiaire du Programme d’action intégrale contre les mines antipersonnel (AICMA), qui vise le déminage humanitaire, la réadaptation physique et psychologique des victimes et de leurs familles, l’éducation préventive et la relance socio-économique des zones déminées ;

 

Les conseils techniques efficaces et l’appui fournis par le programme AICMA et l’Organisation interaméricaine de défense (OID) au déroulement des activités de déminage en Équateur et au Pérou par le truchement d’un groupe de moniteurs internationaux choisis par l’Organisation et désignés au moyen de la coopération des Gouvernements du Brésil, du Chili, du Honduras et du Nicaragua ;

 

PRENANT NOTE EN OUTRE des travaux réalisés par l’Équateur et le Pérou, avec la collaboration de l’AICMA et du Gouvernement canadien, pour organiser les réunions régionales ci-après : en août 2003 au Pérou, le séminaire régional intitulé : « Sur la voie d’un Continent américain libre de mines antipersonnel » […]

 

[…]

 

 

Discussion

I. Qualification de la situation et droit applicable

1. Comment qualifieriez-vous affrontements armés qui ont opposé le Pérou et l’Équateur en 1995 ? Quel serait le droit applicable ? (CG I-IV, art. 2 ; PA I, art. 1)

2. Quel est le droit applicable aux mines antipersonnel ? Les règles relatives aux mines antipersonnel sont-elles applicables aussi bien dans les conflits armés internationaux que non internationaux ? (PA I, art. 35 ; CAC, art. 1 ; Protocole (II) à la CAC tel que modifié, art. 1 ; Convention d’Ottawa, art. 1 ; DIHC, règles 70, 81, 82, 83)

3. Le Pérou est-il partie aux instruments juridiques relatifs aux mines antipersonnel ? Quelles obligations relatives aux mines antipersonnel incomberaient à un État qui ne serait pas partie aux instruments susmentionnés ?

 

II. Destruction des stocks, élimination des mines et coopération et assistance internationales

4. Un État a-t-il l’obligation d’éliminer les mines antipersonnel de son territoire si elles sont déjà enfouies dans le sol ? Quelles informations l’État doit-il prendre en compte pour déterminer son action de lutte contre les mines ? Quel est le cadre temporel des obligations relatives à l’élimination des mines ? Le délai fixé pour remplir ces obligations peut-il être prolongé ? Si oui, par qui et sous quelles conditions ? (Protocole (II) de la CAC tel que modifié, art. 10 ; Annexe technique au Protocole (II) à la CAC tel que modifié, 1, 2 ;  Convention d’Ottawa, art. 5 ; DIHC, règle 83)

5. Les parties au conflit ont-elles l’obligation de coopérer en vue de déminer les zones polluées par des mines terrestres antipersonnel ?

6. Quel rôle jouent des États tiers et les organisations internationales et régionales dans le processus de déminage ? Les États tiers ont-ils l’obligation de coopérer ?

7. Le cadre juridique applicable aux mines terrestres antipersonnel s’intéresse-t-il aux victimes et à leurs besoins ? (Protocole (II) à la CAC tel que modifié, art. 10, art. 11, Convention d’Ottawa, art. 6)

 

III. Éléments contribuant au respect du DIH

8. Pouvez-vous établir un lien entre les activités de déminage et le processus de paix entre les États impliqués dans le conflit armé ? Êtes-vous d’accord avec l’affirmation selon laquelle la coopération entre des États qui ont été parties à un conflit pourrait être une « mesure concrète d’encouragement de la confiance mutuelle » (Document D) ?

9. D’après vous, toute considération humanitaire mise à part, pourquoi des États tiers et des organisations régionales et internationales apportent-elles un appui aux efforts entrepris par le Pérou et l’Équateur pour éliminer les mines ? Pensez-vous que le déminage contribue à la paix et à la stabilité dans la région ?