Règles fondamentales du droit international humanitaire (DIH) applicables dans cette situation :
Chaque partie au conflit doit respecter et faire respecter le DIH par ses forces armées ainsi que par les autres personnes ou groupes agissant en fait sur ses instructions ou ses directives ou sous son contrôle.
Les États et les parties au conflit doivent dispenser une instruction en DIH à leurs forces armées.
Les États doivent encourager l’enseignement du DIH à la population civile.
Résumé du cas d’étude
Entre 1996 et 2006, un conflit armé a opposé le gouvernement népalais au Parti communiste népalais-maoïste (PCN-M), renforçant la nécessité de faire connaitre le DIH aux forces armées du Népal.
À la suite d’échanges soutenus avec le CICR, l’Armée royale népalaise (ARN) a intégré le DIH dans ses programmes de formations militaires en 1997. Ces formations sont par la suite devenues obligatoires sur le plan juridique, en vertu de la loi sur l’armée de 2006.
Respect du DIH : les points à retenir
- En 1997, après des discussions avec le CICR et la Société nationale de la Croix-Rouge népalaise, l’Armée royale népalaise a décidé d’intégrer le DIH dans ses formations standards à destination du personnel militaire à tous les niveaux, y compris les soldats qui s’apprêtaient à être déployés dans des missions de maintien de la paix des Nations Unies.
- Après avoir suivi des formations générales dispensées par le CICR, trois commandants de l’armée népalaise à la retraite ont donné un premier cours en juin 1997. Celui-ci portait sur le comportement des soldats lors des opérations, en intégrant des exercices sur le terrain et en classe. Les participants ont reçu une brochure sur le code de conduite élaboré pour la situation au Népal, dont le préambule avait été rédigé par le chef d’État-major de l’armée.
- Les années suivantes, l’ARN a dispensé des formations sur le DIH à des milliers de membres du personnel militaire au Népal, qu’il s’agisse de jeunes recrues ou d’officiers supérieurs. L’armée a enrichi ces formations en ajoutant des références, en publiant une fiche sur les règles d’engagement et des brochures sur les droits de l’homme. L’armée a également produit un manuel pour les commandants et un documentaire sur le droit des conflits armés.
- Avec le soutien du CICR et d’autres organisations internationales, des officiers de l’armée népalaise sélectionnés ont également participé à des cours à haut-niveau au sein de l’Institut international de droit humanitaire en Italie.
- En 2006, le gouvernement népalais a promulgué la loi sur l’armée qui prévoit que les formations sur le DIH deviennent une obligation juridique pour tous les membres recrutés au sein de l’ANR.
Ce cas pratique a été élaboré par Pierpaolo Castiglioni, Yiota Constantinidi, Fiammetta Ferioli, étudiants en droit (LL.M.) à l’université Rome III, sous la supervision de Giulio Bartolini (professeur) et de Tommaso Natoli (assistant de recherche), de la clinique de DIH de l’université Rome III, avec le concours de Jemma Arman et Isabelle Gallino, étudiantes en droit (LL.M.) à l’Académie de Genève.
A. NÉPAL : DROIT HUMANITAIRE INTÉGRÉ À L’INSTRUCTION MILITAIRE
[Source : « Népal : droit humanitaire intégré à l’instruction militaire », 25 juin 1997, communiqué de presse du CICR, disponible à la p. 70 : https://library.icrc.org/library/docs/DOC/DOC_00395.pdf]
L’Armée royale népalaise a accepté d'intégrer le droit international humanitaire (DIH) dans son programme d'instruction à partir de juin 1997. La décision d’inclure un cours de DIH aux cinq échelons de la formation, des officiers supérieurs à la troupe, ainsi que dans le cadre de ses opérations avec les Nations Unies, est l'aboutissement des efforts de la délégation régionale du CICR pour l’Asie du Sud. Celle-ci, agissant conjointement avec la Croix-Rouge du Népal, maintient en effet des contacts réguliers avec l'Armée royale népalaise depuis plus de deux ans.
Le premier cours de DIH, conçu à l'intention des chefs de bataillon par le délégué régional (Asie du Sud) du CICR chargé des relations avec l'armée et les forces de sécurité, débutera le 25 juin 1997 à l'Army Staff College de Tokha, à Katmandou. Les exercices prévus – à effectuer, selon les cas, en classe ou sur le terrain – auront essentiellement pour sujet le comportement des soldats au combat. Le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, son importance toujours d'actualité, et le rôle du CICR et de la Croix-Rouge du Népal figureront également parmi les sujets traités. Les instructeurs seront les généraux à la retraite Digamber S.J.B. Rana, Dipta P. Shah et Lal Bahadur Chand. Tous trois ont suivi l’année dernière un programme de formation très complet du CICR, et exercent pour lui des fonctions de consultants régionaux auprès de l'Armée royale népalaise.
Un code de conduite pour combattants, publié sous forme de brochure, a été traduit en népali à l’occasion de ce cours, avec une préface du chef d’état-major de l'Armée royale népalaise.
B. LE CICR CONTINUE DE DISPENSER DES FORMATIONS AUX MEMBRES DE L’ARMÉE ROYALE NÉPALAISE
[Source : « ICRC training to RNA men going on », 7 septembre 2007, Himalayan Times, [traduction CICR] disponible sur : https://thehimalayantimes.com/nepal/icrc-training-to-rna-men-going-on/]
Katmandou, 7 septembre :
Bien que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Népal ait cessé de visiter les centres de détention de l’Armée royale népalaise (ARN) depuis environ six mois [...], les cours sur le droit international humanitaire dispensés aux officiers de l’armée ont continué.
Selon un délégué du CICR, deux officiers de l’ARN ont récemment été sélectionnés pour suivre une formation militaire sur le droit international humanitaire à l’Institut international de droit humanitaire de San Remo (Italie), grâce au soutien du CICR.
D’autres organisations internationales parrainent 15 membres de l’ARN qui suivent la même formation. D’après le délégué du CICR, ce programme annuel de formation a été mis en place il y a quelques années déjà. Selon l’ARN, le cours de DIH, qui durera deux semaines, débutera fin octobre. Le CICR propose également des formations destinées aux membres de l’ARN dans le pays. Tandis qu’un consultant local se charge de la formation des échelons subalternes de l’ARN sur le droit des conflits armés, un formateur du CICR expatrié et basé à New Delhi, responsable de la région Asie du Sud, se rend régulièrement à Katmandou pour former les officiers de l’armée.
Selon le délégué du CICR, le formateur passe au moins deux semaines à Katmandou à chaque fois qu’il vient former des militaires. [...]
C. LES DROITS DE L’HOMME DANS L’ARMÉE NÉPALAISE
[Source : Human Rights in NA, (non daté), Armée népalaise, [traduction CICR] disponible sur : https://www.nepalarmy.mil.np/page/human_rights]
[…]
[L]’Armée népalaise a intégré l’enseignement du droit international des droits de l'homme (DIDH) et du droit international humanitaire (DIH) dans tous les programmes d’instruction militaire. La direction des droits de l’homme dispense un cours sur les principes fondamentaux du DIH sur une durée de six jours et, en coopération avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), offre une formation avancée sur le DIH pendant cinq jours dans les locaux de l’organisation. Dorénavant, tout le personnel de l’armée sera sensibilisé sur les questions relatives au DIDH et au DIH alors que plus de 42 000 membres du personnel militaire ont d’ores et déjà participé aux formations dispensées par la direction en ce sens. Outre les formations sur le DIH, la direction propose deux formations sur le genre - une sur deux jours et l’autre sur six jours - destinées aux formateurs du personnel de l’armée. La direction a déjà formé 2 800 militaires sur la question de l’égalité entre les genres et sur les résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité des Nations unies.
L’armée népalaise a diffusé diverses brochures et fiches visant à protéger et à promouvoir le DIDH et le DIH au sein de l’institution, telles que la Fiche du soldat, la Fiche des règles d’engagement, le Livret des droits de l’homme et le Livret annuel des droits de l’homme. Par ailleurs, le « Manuel de commandement sur le droit des conflits armés », publié par la direction, sert de support aux commandants pendant les opérations. Enfin, un documentaire sur le droit des conflits armés a été produit.
L’armée népalaise, en coordination et en coopération avec ONU Femmes, a élaboré six manuels de formation portant sur l’égalité entre les genres et s’appuyant sur les résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité des Nations unies. L’armée a également réalisé un docu-fiction intitulé « Tara », qui présente les principes contenus dans les résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité des Nations unies et un documentaire intitulé « Un environnement favorable pour les femmes au sein de l’Armée népalaise », qui sont utilisés comme supports de formation.
[…]
D. LOI SUR L’ARMÉE, 2063 (2006)
[Source : Army Act, 2063 (2006), Népal, [traduction CICR], disponible sur : http://www.ilo.org/dyn/natlex/natlex4.detail?p_lang=&p_isn=87475&p_country=NPL&p_count=118]
[...]
20. Formations et apprentissage :
1) Toute personne souhaitant intégrer l’Armée népalaise devra suivre des formations et bénéficier d’un apprentissage sur des sujet tels que l’enseignement militaire, l’éthique, l’exercice physique, les droits de l’homme et le droit international humanitaire.
(2) Les dispositions relatives aux formations et apprentissages mentionnées dans la sous-section 1) seront telles que prescrites dans la présente loi.
[...]
Discussion
I. Qualification de la situation et droit applicable
1. Comment décririez-vous la situation entre les maoïstes et le gouvernement népalais ? De quelles informations supplémentaires auriez-vous besoin pour procéder à une telle qualification ? (CG I-IV, art. 2 et art. 3 ; PA II, art. 1)
II. Diffusion du DIH
2. Les États sont-ils tenus de diffuser le DIH dans les rangs de leurs forces armées ? L’obligation de diffuser le DIH s’applique-t-elle seulement pendant un conflit armé, ou aussi en temps de paix ? (CG I-IV, art. 1 ; CGI, art. 47 ; CG II, art. 48 ; CG III, art. 127 ; CG IV, art. 144 ; DIH coutumier, Règle 142) Pourquoi ?
3. Existe-t-il aussi une obligation de diffuser le DIDH au sein des forces armées ? Pourquoi est-il important que les forces armées connaissent aussi le DIDH ?
4. Le CICR est-il soumis à l’obligation juridique de respecter et de faire respecter le DIH, comme le sont les États ? (CG I-IV, art. 1, DIH coutumier, Règle 142) Sur quel fondement s’appuie le mandat du CICR pour diffuser le DIH ? (Statuts du Mouvement, art. 5, et Statuts du CICR, art. 4) Est-il important que le CICR et les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge diffusent le DIH même si les États remplissent déjà leurs obligations à cet égard ? Pourquoi ?
III. Éléments contribuant au respect du DIH
5. (Document A) Comment le CICR a-t-il favorisé l’introduction du DIH dans le programme d’instruction militaire de l’Armée royale népalaise ? Selon vous, quels sont les avantages de la participation du CICR aux formations sur le DIH ? Le soutien qu’apporte le CICR aux gouvernements pour diffuser le DIH pourrait-il ne plus être nécessaire au bout d’un certain temps ?
6. Selon vous, quels sont les moyens les plus efficaces de diffuser le DIH dans les rangs des forces armées ? Des formations de six jours sont-elles suffisantes ? Quelles autres méthodes proposeriez-vous ?
7. Quels sont les avantages et les inconvénients d’envoyer des militaires népalais en formation à San Remo (Italie) avec des militaires d’autres pays ?
8. À partir de grade militaire les soldats devraient-ils participer à des formations sur le DIH ? La formation devrait-elle différente en fonction du grade des militaires qui y participent ? Comment le principe de responsabilité du commandement pourrait-il inciter les membres hauts gradés des forces armées à veiller à ce que les militaires placés sous leur commandement soient formés au DIH ? (PA I, art. 86, par. 2, 87 ; DIH coutumier, Règles 152 et 153)